Allen Goff, Vice-Président du département ventes et marketing de Pandrol USA nous parle des défis auxquels sont confrontés les réseaux ferrés de fret lourd et explique pourquoi il est important de bien établir le cahier des charges des fixations dès le départ.
« Les réseaux ferrés de fret lourd se trouvent généralement dans des zones comportant de fortes concentrations de gisements de minéraux, souvent dans les endroits les plus difficiles d’accès et les plus hostiles du monde. Les voies qui traversent ces terrains difficiles, où les températures varient entre 40°C et -40°C et où le tonnage transporté peut dépasser 200 millions de Gt/an, nécessitent des fixations de rails capables de résister à ces conditions extrêmes.
De nombreux réseaux ferrés de fret lourd doivent également faire face à une augmentation du tonnage liée à la reprise des prix et des volumes mondiaux de marchandises après une chute il y a quelques années. S’ajoute à ce contexte le fait que de nombreuses voies ont été construites à une époque où la demande en minéraux, et donc le tonnage transporté, était moins importante. Aux États-Unis, par exemple, le réseau de fret lourd suit des normes fixées au 19ème siècle et certains lieux présentent encore des traverses en bois et des fixations en « crampons et anticheminant ».
L’augmentation du tonnage sur certaines voies ferrées a entraîné une détérioration précoce de la structure des rails ainsi que des problèmes avec les fixations, surtout lorsque ces dernières ont été mal définies à l’origine.
Dans ce genre de situations, qui, par nature, concernent des lieux isolés et difficiles d’accès, il faut un système de fixation qui ne nécessite qu’un minimum d’entretien et qui dure sur le long terme.
Un tonnage annuel élevé
Il n’est pas rare qu’une voie ferrée transporte deux cents millions de tonnes par an, contre environ 20 millions de tonnes par an de fret non-lourd. Même sur les voies ferrées destinées au fret lourd, le tonnage réellement transporté dépasse de loin ce que les systèmes de rails étaient conçus pour supporter à l’origine, ce qui augmente la pression sur le système de rails, de fixation et de traverses. Cette hausse du tonnage devrait entraîner une augmentation de la fréquence du besoin d’entretenir ou de remplacer les fixations. Lorsque l’on remplace un système de fixation existant, il est donc important d’adopter une solution de fixation nécessitant peu d’entretien et qui puisse résister aux conditions difficiles de la circulation de fret lourd moderne.
En outre, dans ce domaine, le coût d’entretien et de remplacement des fixations est faible comparé aux frais de main-d’œuvre et de fermetures de voies. La plupart des compagnies de chemin de fer spécialisées en fret lourd ne prévoient de remplacer de petits composants que lorsqu’elles entreprennent d’autres travaux d’entretien, comme le remplacement des rails. D’énormes économies peuvent donc être réalisées en s’assurant que la durée de vie des composants de fixation dépasse celle des rails. Cependant, cela devient plus difficile à mesure que la durée de vie des rails et le tonnage transporté augmentent. Il est désormais prévu que les voies ferrées principales destinées au fret lourd aux États-Unis durent pendant l’équivalent de 3 milliards de tonnes de circulation sur une voie en alignement. Il est donc possible de récupérer rapidement les économies nettes réalisées sur un investissement dans des composants de fixation durables.
Des forces de traction importantes
De fortes forces de traction peuvent exercer une pression longitudinale et avoir ainsi une influence sur le cahier des charges. Dans le domaine du fret non-lourd, une fois les rails conçus pour résister aux pressions dues à l’expansion et à la contraction thermiques, les forces de freinages maximales prévues seront par défaut assez importantes pour supporter les forces de traction qui leur seront appliquées.
Cependant, dans le cas du fret lourd, qui implique des forces de traction plus fortes, cela peut entraîner une défaillance des rails. Cela se manifeste d’abord par un mouvement irrégulier des traverses, qui sont déformées et mal positionnées par rapport aux rails et au ballast.
La solution à ce problème réside dans la conception, la construction et l’entretien d’une plate-forme de grande qualité et dans l’attention toute particulière portée au cahier des charges des fixations de rails qui doivent présenter une élasticité de cisaillement longitudinale adaptée. Les tests réalisés sur différents types de semelles de rail ont entraîné des résultats très différents en matière d’amortissement des effets de forces de traction élevées.
Établir le cahier des charges
Le troisième facteur qui entre en jeu dans le cahier des charges des fixations est lié au fait que la plupart des voies ferrées de fret lourd sont proposées par des sociétés minières et non par des compagnies de chemin de fer bien établies. Le chemin de fer est donc absorbé par le projet minier, car c’est le moyen le plus économique et fiable de transporter des marchandises en vrac de la source au consommateur. Dans la plupart des cas, la conception, la construction et même l’exploitation des voies ferrées sont gérées à travers des appels d’offre comme n’importe quel autre investissement de capital.
Ces processus devraient se baser sur un cahier des charges des voies de fret lourd, mais il n’existe aucune norme technique qui prenne en compte les facteurs affectant ce genre de voies ferrées. En pratique, se contenter d’adopter le cahier des charges d’une voie pour l’appliquer à une autre ailleurs dans le monde est rarement suffisant. Le secteur des voies ferrées de fret lourd est connu pour sa tradition de partage des connaissances grâce à des organisations comme la IHHA, association spécialisée dans ce domaine, qui a aidé à développer de meilleures pratiques transposables à de nouveaux projets plus complexes. Ce genre d’initiative facilite la rédaction d’un cahier des charges des fixations qui réponde aux défis du marché en question.
Des conditions météorologiques extrêmes
La localisation des voies ferrées de fret lourd coïncide souvent avec des climats extrêmement difficiles, car les gisements de minéraux, surtout ceux de minerai de fer, sont exploités dans des lieux de plus en plus difficiles d’accès. Cela peut poser un problème dans l’utilisation de matériaux pour les systèmes de fixation des rails. L’acier et le béton résistent assez bien à des climats extrêmes, mais pour d’autres matériaux, comme le plastique, cela peut être un vrai défi. Le plastique est très utilisé pour ses propriétés d’isolation électrique, de résistance et parfois dans la conception d’éléments d’usure sacrifiés.
L’autre défi posé par les éléments météorologiques est la main-d’œuvre. La construction et l’entretien des voies nécessitent encore beaucoup de main-d’œuvre. On tend donc à automatiser et à augmenter les intervalles d’entretien, car le facteur humain doit être pris en compte dans les climats hostiles.
Norfolk Southern Railways USA
Il s’agit d’une des compagnies de chemin de fer de fret lourd qui a aidé à rédiger le cahier des charges des selles de rail. Pandrol a collaboré avec Norfolk Southern Railways dans le cadre de ce projet afin de développer, pour la première fois, une selle de rail asymétrique de 18 pouces (environ 46 cm) dans les endroits où le dévers inversé des rails était un problème. Dans ces zones, les rails étaient fixés avec des attaches en bois, mais toutes les selles de rail avec des attaches élastiques disponibles sur le marché à l’époque avaient une surface d’encombrement plus petite. Il était indispensable d’établir un nouveau cahier des charges pour la conception d’une selle de rail destinée au fret lourd, et ce pour relever plusieurs défis : puissance locomotive plus grande, freinage dynamique, augmentation de la circulation tous les ans, sections de rails plus grandes et variation dans la solidité des attaches.
Les caractéristiques techniques les plus importantes étaient : un contact maximum de la zone de pivot avec l’attache, une augmentation de ce contact, une augmentation de l’asymétrie de la zone de pivot du côté extérieur, un emplacement pour une attache au centre de la selle de rail, un espace pour quatre tire-fonds et deux crampons et en définitive des économies d’argent réalisées sur une selle en fonte.
Pandrol a donc proposé la selle de rail VICTOR, qui a la même surface d’encombrement que la selle de rail asymétrique standard AREMA de 18 pouces et inclut un épaulement en fonte estampé utilisant un e-clip Pandrol standard pour fixer le rail sur la selle. Cette selle de rail est conçue pour des charges à l’essieu élevées sur des attaches en bois.
La zone d’essai était une courbe de 6,0 degrés (rayon de 290 m) sur une pente de 0,09 % avec une surélévation de 3,5 % (90 mm) principalement destinée à la circulation de trains de charbon pour un total d’environ 40 millions de tonnes brut par an. La selle de rail VICTOR de Pandrol est dotée de crampons pour la fixer aux attaches sur cette voie ferrée utilisant principalement des crampons. VICTOR a été contrôlée et elle donne de bons résultats en matière de réduction de la rupture des selles de rail et de l’élargissement de l’écartement, ce qui réduit la nécessité d’entretien pour cette courbe.
La selle de rail VICTOR fournit une zone de pivot maximale, tandis que l’utilisation d’attaches Pandrol offre aux voies ferrées de fret lourd des fixations résistantes avec une puissance de maintien supérieure, qui empêchent le renversement des rails et réduit la nécessité de maintenance.
Norfolk Southern railways a également défini l’utilisation des selles VICTOR de Pandrol dotées de tire-fonds dans la fixation des ponts. À ce jour, Norfolk Southern Railways a installé plus de 3 millions de selles de rail VICTOR. Ces selles ont montré leur efficacité en matière de réduction de la détérioration, du dévers inversé des rails et des conditions d’élargissement de l’écartement, ainsi qu’en termes de diminution du renversement des rails. En traitant ces questions, la compagnie de chemin de fer a pu réduire ses coûts d’entretien et augmenter son efficacité.
Un rendement élevé pour une faible maintenance
Il est donc clair qu’il est nécessaire d’améliorer la performance des fixations de rail pour qu’elles puissent supporter des charges à l’essieu et des courbures qui peuvent entraîner des problèmes comme un dévers de rails inversé et la nécessité d’un entretien constant. Les compagnies de fret lourd cherchent de plus en plus à utiliser des fixations qui permettent une mécanisation à fort rendement pour une installation et un entretien à moindre coût pour les sociétés ainsi qu’une efficacité toujours constante lors d’opérations stressantes, d’interventions de remplacement de rails ou d’activités d’entretien tout au long de la durée de vie du système de fixation.
C’est l’innovation qui a permis de trouver des solutions dans ce secteur, de surmonter beaucoup de ces problèmes et d’aider les compagnies de chemin de fer à réduire la nécessité d’entretien et à allonger la durée de vie de leurs systèmes de fixation.